Quel peut être l’impact d’une carence affective dans l’enfance sur les relations amoureuses ?
Quel peut être l'impact d'une carence affective dans l'enfance sur les relations amoureuses ?
Parmi les blessures profondes qui ont des conséquences importantes sur la vie d’adulte, la carence affective tient une place particulière.
Ce “schéma”, élaboré très tôt (parfois même avant l’apparition du langage), ne se cristallise pas autour de pensées structurées. La carence affective est ressentie comme une lacune et procure une sensation de vide. Elle correspond à l’impression d’être destiné à rester toujours seul, à ne jamais parvenir à être entendu ou compris, à un sentiment de solitude, d’absence.
Contrairement à l’abandon, les parents sont présents physiquement mais l’enfant ressent un manque qui peut être à 3 niveaux :
- manque de “maternage”, d’affection, de démonstrations physiques d’amour, de soins, d’attention, d’apaisement
- manque d’empathie : l’enfant ne se sent pas compris, entendu, écouté, on ne fait pas attention à lui, il est “négligé”, ses besoins ne sont pas perçus
- manque de protection, de guidance, d’orientation, l’enfant ne peut compter sur rien de solide
Un de ces manques peut suffire à procurer à l’enfant un sentiment de solitude mais parfois, ils se combinent. Ce ou ces manques vont conduire à un sentiment d’insuffisance qui se maintiendra malheureusement à l’âge adulte. Dans ce schéma, quelque chose est donc absent, que l’enfant n’a jamais pu connaître.
Pourtant, une fois adultes, ces personnes peinent souvent à reconnaître qu’elles ont connu un manque dans leur enfance. Pour elles, leur enfance était “normale”, ce qui fait que le schéma de carence affective leur est difficile à déceler.
Ces personnes vivent souvent des déceptions chroniques, constamment répétées, dans leur vie amoureuse. En dépit de toutes les preuves d’affection, leur sentiment d’insuffisance persiste, peu importe ce qui est “reçu”, ce n’est jamais assez. Elles vivent une situation de manque qui reproduit le scénario de l’enfance.
Le schéma de carence affective, dans la vie amoureuse de l’adulte, peut prendre deux visages diamétralement opposés, qui sont deux manières de s’adapter : la capitulation ou la contre-attaque.
Dans le cas de la capitulation, la compensation au manque se fait en donnant beaucoup d’attention et d’amour. Ce sont des personnes qui développent beaucoup d’efforts pour s’occuper des autres mais qui ont le sentiment que personne ne s’occupe de leur bien-être affectif. Ce sont des personnes qui “se coulent” dans le désir de l’autre mais qui n’écoutent pas leurs propres besoins et, bien sûr, sont incapables de les exprimer à leur partenaire. Elles vont souvent être attirées par des partenaires indisponibles (physiquement ou émotionnellement), froids ou distants, dans une reproduction du scénario de l’enfance bien connu. Elles s’attendent à ce que leur partenaire lise dans leurs pensées et comble leur besoin comme par magie. Malheureusement, personne ne peut le faire et elles se retrouvent alors dans une grande frustration qui mène à de la colère ou au repli sur soi et à l’enfermement. C’est le silence qui fait loi.
Dans le cas de la contre-attaque, d’autres types de personnes vont réagir par l’hyper-exigence et la revendication excessive. Leur moyen de compenser leur carence est de devenir hostiles et exigeantes, dans un schéma narcissique. Elles se comportent comme si tout leur était dû, demandant et recevant beaucoup de leur partenaire. Quand bien même, ce n’est jamais suffisant pour combler leur vide affectif et ces personnes continuent à ressentir une grande frustration. En réalité, elles sont frustrées de ne pouvoir recevoir une affection authentique, qu’elles n’ont jamais pu expérimenter mais qu’elles poursuivent pourtant. Dans leur enfance, ces personnes ont pu bénéficier de compensations souvent matérielles qui, sans combler leur carence affective, leur ont apporté un semblant d’équilibre. Elles reproduisent ainsi ce qu’elles ont connu enfant, en étant incapables de vivre des relations profondes et authentiques, ne sachant finalement même pas à quoi cela peut bien ressembler. C’est la colère et la revendication excessive qui font loi.
Une fois identifiés, ces schémas peuvent être traités de manière à pouvoir s’ouvrir à des relations authentiques et fonctionnelles. C’est un travail qui requiert du temps et des efforts pour le contre-carrer car il est profondément inscrit. Certains ont plus de difficultés que d’autres à se déparer de leur armure, notamment ceux qui sont dans la contre-attaque.
Lorsque nous observons des récurrences dans des situations que nous expérimentons, il peut s’agir de scénarios de vie, de schémas inscrits en profondeur, qui agissent tels des programmes automatiques. Les identifier est un premier pas vers un changement. Et vers la possibilité de vivre enfin autre chose.
Source : La thérapie des schémas – Jeffrey E. Young
Crédit photo : Pixabay