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Comment gérer les gens qui se plaignent ?

Comment gérer les gens qui se plaignent ?

Des personnes qui se plaignent, nous en avons tous autour de nous, que ce soit dans notre vie personnelle ou dans notre vie professionnelle. Certaines se plaignent un peu, d’autres beaucoup, d’autres encore passionnément…

Alors, comment se protéger de cette énergie négative ? Comment réagir devant la plainte ? Comment gérer les relations avec les plaintifs ?

 

Tout d’abord, pourquoi s’en protéger ?

Il s’avère que l’exposition prolongée à la négativité et aux plaintes d’autrui nuisent à notre cerveau. En effet, grâce aux neuro-sciences (étude relayée par Trevor Blake dans son livre “Three Simple Steps : a map to success in business and life”), il a été découvert que notre cerveau s’adapte naturellement, et sans que nous en ayons conscience, à l’humeur de ceux qui nous entourent, surtout quand nous passons beaucoup de temps avec eux. Ce processus, dit des neurones miroir, est à la base du sentiment d’empathie. Le revers de la médaille, c’est que les “jérémiades” s’apparentent à la tabagie : pas besoin d’être fumeur pour en subir les effets négatifs. Il faut donc faire preuve de prudence quand on fréquente des gens qui ne cessent de se plaindre de tout et de rien.

Trevor Blake explique ainsi que le cerveau humain agit comme un muscle, qu’il est très élastique et qu’il s’adapte à l’environnement auquel il est confronté. « Si vous êtes coincé longtemps, quelque part, en écoutant une personne négative, vous êtes plus susceptible de vous comporter de la même manière qu’elle ».

Mais il y a pire : l’exposition à la négativité rendrait “bête”. En effet, les scientifiques ont démontré qu’une exposition de 30 minutes à un discours ou comportement négatif a pour effet de détruire des neurones de l’hippocampe…

Ce que la personne qui se plaint ne sait pas (et elle est rarement consciente de se plaindre d’ailleurs), c’est que cela est également nuisible pour elle-même. Cette négativité déclenche dans le corps une production de cortisol, l’hormone du stress. Les quantités de cortisol produites par les personnes qui se plaignent fréquemment dégradent le système immunitaire et favorisent un taux élevé de cholestérol, le diabète, les maladies cardiovasculaires, l’obésité et les attaques cérébrales. Par ailleurs, évoquer de manière récurrente quelque chose qui ne va pas nous installe dans ce que l’on appelle un “état interne” négatif. Ainsi, lorsque nous ressassons nos problèmes, nous faisons vivre et revivre les émotions négatives qui y sont attachées. Une boucle sans fin…

Qu’est-ce que la plainte au fond ?

En réalité, la plainte est une demande qui n’en est pas une. En effet, la plainte est une expression de mécontentement ou de souffrance qui a vocation à être entendue mais qui ne débouche sur aucune demande spécifique.

Selon Saverio Tomasella, psychanalyste et auteur de “Syndrome de Calimero”, la plainte a plusieurs visages :

1. La plainte « Regarde-moi » : elle sert à se mettre en valeur et à attirer l’attention.

2. La plainte « Allez, plains-moi » : elle permet de forcer la commisération des autres, vite taxés d’ingrats s’ils ne montrent pas assez d’empressement et de compassion.

3. La plainte « Mon cinéma personnel » : il s’agit de mettre en scène une problématique sous-jacente, un problème hérité de ses parents ou le modèle relationnel prégnant dans sa famille.

4. La plainte « Attention danger, j’ai peur ! » : cette plainte est incompréhensible pour l’entourage qui n’a pas eu accès aux informations (trauma personnel, mémoire généalogique) qui permettraient de comprendre pourquoi la personne se plaint, par exemple, d’être harcelée ou agressée, alors qu’en apparence rien ne le laisse supposer.

5. La plainte « J’ai mal, entends ma douleur » : il s’agit là d’une persistance dans la lamentation qui n’est pas très bien accueillie par l’entourage et qui, malheureusement, pousse le plaignant à intensifier la dose.

Attention, toute plainte n’est pas négative si elle reste ponctuelle et certaines sont légitimes.

La plainte, utilisée de manière ponctuelle, est plutôt positive car elle permet d’exprimer une souffrance qui demande validation. Elle permet également d’attirer l’attention sur une injustice ou un problème pour pouvoir éventuellement trouver une solution avec l’autre ou les autres. C’est la plainte “constructive”. Lorsque l’on est au bord du burn out par exemple, la plainte renvoie à une souffrance réelle et légitime et cette plainte va permettre de pouvoir sortir de l’enfer. Or, si la “souffrance” n’est pas entendue, la personne continuera à tenter de l’exprimer, d’une manière ou d’une autre. Et pourra ainsi continuer à se plaindre. Pire, si cette plainte est moquée, elle va générer encore plus de souffrance et un sentiment d’injustice. Alors la plainte s’installera encore plus profondément.

Pour Saverio Tomasella, “Nous sommes dans une société au bord de l’implosion. Les injustices y sont de plus en plus criantes. Il y a un parallèle à faire avec le monde précédant la Révolution de 1789 : les privilèges accordés à certains et les abus sont légion. Ces rigidités de la société provoquent chez beaucoup un sentiment d’injustice, un besoin de se plaindre et une intense quête de renouvellement”.

Comment gérer la plainte d’autrui ?

Ce n’est pas la même chose d’entendre nos proches ou collègues râler contre la météo, le gouvernement, les embouteillages ou les entendre évoquer un souci majeur les concernant. Il s’agira bien évidemment d’estimer au préalable le degré de souffrance implicite.

  • Si la plainte reflète a priori une souffrance réelle ou un problème légitime sur lequel on peut agir, la première chose à faire est de prendre le temps d’écouter la personne, de lui poser des questions pour comprendre ce qui ne va pas et d’amorcer la recherche de solution avec elle. On peut éventuellement lui proposer des solutions qu’elle n’aurait pas envisagées elle-même (car trop impliquée) ou des options d’action. Lorsque cette étape est respectée et renouvelée (si nécessaire), cela peut suffire. La personne se sentira épaulée et prise en compte.

  • Si la plainte est légitime mais que rien ne peut être fait (par exemple, une maladie incurable), encore une fois, l’écoute sincère va occasionner, même si vous ne le voyez pas forcément, un réel soulagement. Il est important de souligner que la plainte a une fonction cathartique, c’est à dire de libération émotionnelle par la parole. Même si cela ne résout rien, en parler fait déjà du bien. Si cette écoute authentique ne peut se faire, la personne restera avec sa souffrance et reportera encore et encore sa plainte (jusqu’à ce qu’elle se sente vraiment reconnue dans sa souffrance). A vous de mesurer le temps et l’énergie que vous êtes prêt à consacrer à cette écoute.

  • Si la plainte s’apparente à de la victimisation, sur un mode ponctuel (la personne se plaint d’une situation qu’elle “subit” alors qu’elle pourrait agir par elle-même pour faire évoluer les choses), le recadrage est une approche utile : il s’agit de présenter une autre façon de regarder la situation, lui fournir un autre angle de vue plus positif. Une manière de lui tendre une perche pour lui montrer que, non, ce n’est pas si dramatique que ça. L’idée est de la faire relativiser et reconsidérer.

  • Si la plainte est clairement issue d’une position victimaire au long cours, le recadrage ne fonctionnera pas. On peut opter pour la “confrontation” au sens psychothérapeutique du terme, c’est à dire être un peu provocant (tout en restant calme et posé, il ne s’agit pas d’être agressif évidemment) : “Tu te plains de….qu’as-tu déjà essayé pour que les choses changent ?….Il n’y a donc rien qui marche ? Ce n’est donc pas de ta faute ? Est-ce que je peux faire quelque chose pour t’aider ? Non ? Quelqu’un peut-il faire quelque chose ? Non ? Alors, puisque tu ne peux rien y faire et que personne ne peut rien y faire, peux-tu accepter simplement cette situation ? “. Ou bien, on peut lui demander : “Quand tu me racontes ça, quel est ton besoin derrière ? Que cherches-tu finalement à me dire ?”. Si la personne est de bonne foi, elle exprimera son ou ses besoins et dans ce cas, quelque chose pourra éventuellement être fait. Si elle est clairement de mauvaise foi, il est préférable de mettre des limites et de lui faire comprendre que la discussion est vaine et quoique nous fassions ou disions, rien ne peut aider. On peut par exemple lui dire : “Je fais ce que je peux, je ne peux pas plus. Je peux t’écouter, faire des efforts mais maintenant, c’est à toi de trouver des solutions à ces problèmes”. La limite que l’on pose met le plaintif face à lui-même, en lui montrant qu’il ne peut pas déverser incessamment son mécontentement sur une personne. Cette butée est importante et porte souvent ses fruits. Il vaut mieux stopper l’échange et laisser le “Calimero” se plaindre à quelqu’un d’autre ou comprendre qu’un changement, voire une thérapie, est nécessaire.

  • Si la plainte est une râlerie contre les impondérables de la vie comme la météo ou les embouteillages, à vous de voir, y consacrer du temps n’est sans doute pas la meilleure option. Parfois, un peu d’humour ou un changement de sujet suffisent à désamorcer la mauvaise humeur.

La plainte, lorsqu’elle n’est pas une simple râlerie, est toujours un appel au secours, une demande d’amour masquée.

Maintenant, s’il vous arrive de vous plaindre aussi, il existe des manières plus efficaces que la râlerie ou la complainte. Le psychothérapeute new-yorkais Guy Winch nous donne quelques clés utiles dans son livre : “L’art de se plaindre et de se faire entendre”. Spécialiste de la régulation des émotions, il nous dit comment dépasser la colère et la frustration et comment formuler une “bonne plainte”. L’art de se plaindre aurait de multiples vertus : non seulement, il contribuerait à résoudre positivement les problèmes (plutôt que de râler dans le vide) mais il aurait ensuite pour effet d’augmenter l’estime de soi et d’améliorer les relations avec autrui (alors que le silence ou la colère enveniment les relations).

Source : Cerveau & Psycho

Crédit photo : Pixabay